mardi 8 janvier 2019

Atelier d'écriture du 8 janvier 2019


Thème : arrêtez de me regarder !

V : Bon ! Tu vas continuer ça longtemps ?
E : Hein ? Quoi ? Comment ?
V : Ne fais pas l’innocent ! Tu sais très bien de quoi je parle.
E : Pas du tout. De quoi parles-tu ?
V : Tu sais très bien de quoi je parle, Erik ! Arrête de me regarder ! C’est un des thèmes de ton atelier de l’écrit.
E : QUOI ? Tu m’appelles Erik et tu parles de l’atelier de l’écrit ? Mais tu viens de briser le quatrième mur !
V : Pas exactement. Pour briser le quatrième mur, il faudrait que je m’adresse au public tandis que là je m’adresse à l’auteur. C’est très différent. D’ailleurs, chers participants de l’atelier, reprenez donc un petit quelque chose à manger ou à boire ! Voilà ! C’est ça, briser le quatrième mur.
E : Bon ben maintenant que tu as illustré ce concept brillamment, tu veux bien revenir au sujet ? C’est pas qu’on se fait chier mais l’histoire n’avance pas.
V : Bon, je suis la vie.
E : ah ! Enfin, on progresse ! Depuis le début, on se demandait qui étaient les personnages de ce dialogue. Maintenant, c’est clair. Erik et la Vie discutent. On progresse !
V : Ah bravo ! Les pieds dans le plat ! Donc toi tu veux mettre l’intrigue et le thème complètement à plat de manière explicite ? Ca manque de finesse.
E : Oui, ben c’est vrai que ça manque de finesse, j’avoue, mais je ne savais pas vraiment comment le présenter. J’avais très envie d’écrire quelque chose mais je ne savais pas comment. Et quand c’est ainsi, je bidouille un texte qui tient avec des bouts de scotch et de la ficelle.
V : Arrête de me regarder !
E : Ah oui, pardon ! Revenons-en au thème ! Donc oui, je regarde la vie mais je n’y participe pas. Je ne sais pas dire comment ou pourquoi. Trop de cerveau, trop de respect pour imposer ma présence, mes points de vue, mes envies à des gens qui n’ont rien demandé. Vivre ma vie aux dépens de celle des autres. Ou plus exactement, me frayer un espace où exister dans cette boite de sardines qu’est la vie. Si je ne joue jamais des coudes pour trouver ma place, je mourrai. Et non, ça n’est pas une figure de rhétorique. Si on ne trouve pas sa place, on finit par se mettre une balle dans le caisson dans l’indifférence générale.
V : Dis-donc, Calimero, évite d’étaler tes idées noires ! Tu sais bien que te plaindre attire plus de négativité que de soutien.
E : Ah oui, merde ! Donc la vie, c’est comme une boite de sardines. Moralement, je trouve répréhensible de jouer des coudes parce que ça veut dire que les sardines que je rencontre vont se prendre un peu mes coudes. Mais si je veux arrêter de regarder la vie, c’est une des étapes.
V : c’est un bon début. Et quoi d’autre ?
E : Ben, il y a truc qui me semble presque impossible à faire. C’est trouver ce qui me passionne.
V : pourquoi ? Est-ce que tu n’as pas de passion ?
E : Ben, non. C’est un peu le problème. J’aime bien certaines choses mais avec modération. Et je reconstruis ma vie pierre après pierre. D’un champ de ruines ça ressemble maintenant à une maison en construction. C’est très encourageant. Mais je ne sais pas comment me découvrir une passion.
V : pour savoir ce qui te passionne, il faudrait probablement que tu essayes des choses.
E : Je savais que tu allais dire ça ! En même temps, c’est moi l’auteur de ce texte donc forcément, je le savais. Mais ça m’ennuie quand même. Parce que je suis un peu autiste sur les bords et essayer de nouvelles choses, c’est compliqué. Il m’est tellement plus simple de rester cloitré chez moi. Là ça suppose d’identifier et lister 100 activités potentielles puis de me renseigner sur les lieux, les horaires, les contacts, les prix. Et puis de me mettre des coups de pieds aux fesses pour aller faire ces choses là.
V : Si c’est ainsi que tu fonctionnes, alors c’est ainsi que tu peux procéder.
E : Oui, j’imagine que n’importe qui d’autre dirait que les choses se produisent plus naturellement, de manière plus « fluide » ? Mais ce n’est pas aussi naturel pour moi.
V : Tiens ! Calimero est de retour ?
E : Désolé ! Bon, je pense qu’on a couvert le thème. Je vais rendre la parole et me refaire une tartine. C’est ça aussi que d’arrêter de regarder la vie pendant que les autres n’attendent pas pour s’en payer une tranche.

Texte libre

 Un regard jeté nonchalamment par la fenêtre révèle les strates cotonneuses amoncelées. Au plus près de l'horizon, les strates se succèdent, minces, écrasées par la distance. En relevant le regard, les couches de nuages s'élargissent et révèlent des aspérités lumineuses semblables à un réseau veineux. Une brise pousse cette bourre légère qui s'effiloche, se déchire, puis qui se rassemble.
A travers les branches biscornues et tortueuses apparaissent les toits métalliques, quelconques et inintéressants de bâtiments industriels. Inintéressants? Vraiment? Mais pourquoi? Parce que quelqu'un a décidé que flatter ses émotions comme ceci plutôt que comme cela était l'essence même de la vie? Parce que cette décision est collective et partagée par une majorité imperméable aux choses? C'est vrai que les humains sont des objets intéressants. Mais de là à leur consacrer l'exclusivité... bonjour le narcissisme!
Sous les carrés de verre derrière lesquels se pressent des silhouettes, des feuilles orange jonchent la dalle de béton.
La tête pivote. Ramène le regard à l'intérieur de la pièce que son corps occupe. Conscience de son corps. Conscience des caractères affichés sur un écran et des autres corps dans la pièce.

Jeu : rimes en –al, –che, –re, –lette, et –oin 


D’une cocotte en fonte, tapissez le fond avec du foin Assurez-vous que ce matelas ne sera aucunement bancal
Et allongez dessus la plus majestueuse côtelette.
Versez généreusement dessus deux verres de rouge qui tache.
Pas le premier pris non plus mais pas un vin onéreux.
Ajoutez carottes, navets, et chou et de foin étalez une nouvelle mèche.
Refermez d’un lourd couvercle avec soin.
Pendant la longue cuisson au four, faites les pipelettes
Et buvez le reste du vin qui rend heureux
Jusqu’à cuisson complète ; ce sera un régal.


Jeu : mot aimé

Un mot que j’aime et dont jamais je ne me lasse, c’est l’adjectif « fugace ». Etymologiquement à rapprocher de la fuite –on pensera à l’expression « tempus fugit » – il est auditivement et sémantiquement plus proche encore de la fugue. Tout comme cette note musicale qui rebondit de tintement en tintement, qui se dérobe aussitôt qu’elle est apparue, la chose fugace est légère, diaphane, et surtout insaisissable, car sa taille, sa vitesse ou sa complexité la dérobent à notre corps et à nos sens. 



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